Acupuncture et fertilité à Paris - Dr Vinh Nguyen

L’infertilité (V) : Le vécu psychologique de la lutte contre l’infertilité

 

Résumé : Lorsqu’un couple apprend qu’il est concerné par l’infertilité, il entre généralement dans une période d’épreuves psychologiques, qui peuvent mettre à mal son harmonie et sa solidité. C’est non seulement l’image de soi qui change, mais aussi le quotidien, souvent miné par l’obsession de parvenir à procréer.

Le traumatisme de l’infertilité

Il est aujourd’hui assez souvent question, dans les médias ou la littérature de témoignage[1], de la pression psychologique qui peut peser sur un couple en âge de procréer et encore sans enfant. On parle ainsi parfois d’un « devoir d’enfant » pour désigner l’attente de la société vis-à-vis du couple, qui peut devenir particulièrement pesante lorsque le couple décide de ne pas procréer : « En cas d’absence manifeste de ce désir, la société et l’entourage ne tardent donc pas à invoquer un dysfonctionnement conjugal et/ou psychologique et associent a priori à ce sentiment des caractéristiques négatives, telles que l’égoïsme ou l’immaturité[2] ».

Les médias, grand public ou spécialisés, évoquent cependant bien plus rarement le vécu psychologique du couple qui souhaiterait répondre au « devoir d’enfant », mais qui rencontre des problèmes de fertilité.

Ce vécu est marqué par plusieurs dimensions :

  • Un sentiment d’injustice, avec l’impression que les dysfonctionnements biologiques sont venus frapper le couple arbitrairement ;
  • Un bouleversement identitaire, toutes les composantes délicates du désir d’enfant se trouvant soudain interrogées ;
  • Un sentiment de stigmatisation, lorsque la société se met à considérer comme revendication abusive d’un « droit à l’enfant » les tentatives de concevoir malgré tout (« Ces individus se comporteraient eux-mêmes comme des enfants parce qu’ils n’accepteraient pas le principe de réalité[3]. »), à l’aide des dernières techniques médicales (parce que « La pente naturelle de l’histoire est d’accepter tout ce que la science nous propose[4]. ») ;
  • L’impression de ne plus vivre que pour le parcours de PMA ;
  • L’érosion de la sexualité du couple, désormais rythmée par les nécessités de la procréation.

L’infertilité, une épreuve pour le couple

Bien sûr, le plus douloureux, face aux troubles de la fertilité, est d’affronter la possibilité de ne pas concevoir, donc de vivre la remise en question de l’image que l’on avait de soi et de son futur. En outre, c’est aussi le couple qui est fragilisé, car « L’infécondité menace les investissements narcissiques que chacun a projetés sur l’autre du couple[5] ». Léridon souligne que « Le diagnostic d’infertilité ne vient pas seulement traumatiser la femme et son compagnon : l’interaction de ces deux souffrances modifie l’équilibre du couple et les rapports avec leurs ascendants, réveillant des souffrances et des deuils enfouis[6]. » Le paradoxe est que, en entrant dans un parcours de lutte contre l’infertilité, le couple risque de se fragiliser encore davantage, au moins jusqu’à ce qu’une conception survienne.

Tout d’abord parce que « Si les avancées médicales pallient les dysfonctionnements du corps en prenant le relais des organes affectés, ces progrès accentuent parfois un clivage entre corps et psyché[7]. ». Obligé de s’abandonner et de faire confiance, le couple nourrit souvent au départ une « croyance en la toute-puissance de la science et ses possibles[8]. » ; « Il y a une forme d’impatience, et l’illusion qu’avec les techniques existant aujourd’hui on peut tout maîtriser : ses cycles, ses périodes fertiles, l’effet de l’âge[9]. » Cela rend plus rude chaque échec ultérieur qui réactive le traumatisme de l’infertilité.

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Le parcours de lutte contre l’infertilité, une obsession qui dévore le quotidien

Par ailleurs, le parcours de lutte contre l’infertilité requerrait systématiquement un suivi psychologique, pour éviter que l’objectif de procréation ne se transforme en obsession délétère pour la vie de chacun des membres du couple, car ne laissant plus de place pour rien d’autre. Dans beaucoup de cas, en effet, « Les intérêts habituels s’estompent, le travail, les amis, les loisirs, tout perd de son intérêt ; toutes les préoccupations tournent autour des cycles, des traitements, des rendez-vous, de l’attente des résultats[10] ».

Le traitement de l’infertilité s’étendant souvent sur plusieurs années, c’est tout un pan de vie qui peut se trouver englouti par les tentatives de concevoir un enfant. Une patiente, qui s’est finalement tournée vers l’adoption après un très long parcours, témoigne des risques de s’y perdre : « Pendant neuf ans, entre les essais non médicalisés et les FIV, j’ai eu l’impression de ne vivre que pour ça (…) je tombais sur une femme qui parlait de son combat pendant six ans, sept ans, après quatre, cinq, six FIV, fausses-couches (…). Le problème dans la PMA, c’est que je ne pensais qu’à ça. J’étais obnubilée. (…) Croiser une femme enceinte m’était devenue invivable, même mes amies enceintes je ne les supportais plus. Je me suis terrée chez moi, je fuyais le monde. Une prise de poids conséquente de 30 kg a contribué à rejeter toute vie sociale, tellement je me faisais honte[11]. »

Le désir d’enfant est lié à des mécanismes si profonds et si intimes que sa frustration ébranle gravement l’individu ; lorsqu’un couple entame un parcours d’aide à la procréation, il est donc important qu’il soit suivi et soutenu psychologiquement, pour éviter tout risque de dépression.

 

Dr. Nguyen Phuong Vinh.

[1] Chloé Chaudet, J’ai décidé de ne pas être mère, Paris, éditions Iconoclaste, 2021.

[2] Charlotte Debest et Irène-Lucile Hertzog, « “Désir d’enfant – devoir d’enfant” », Recherches sociologiques et anthropologiques, 48-2, 2017, p. 29-51, https://journals.openedition.org/rsa/1907

[3] Raphaëlle Théry, « Peut-on parler d’un droit à l’enfant ? », AJSP, 20 décembre 2018, https://www.revuedesjuristesdesciencespo.com/index.php/2018/12/20/peut-on-parler-dun-droit-a-lenfant/

[4] Jean-Pierre Rosenczveig, « Avoir un enfant : un droit pour tous ? », Le Monde, 17 juin 2018, https://www.lemonde.fr/blog/jprosen/2018/06/17/avoir-un-enfant-un-droit-pour-tous/

[5] Anne-Valérie Mazoyer, Sylvie Bourdet-Loubère, « Évolution du désir d’enfant après l’échec des aides médicales à la procréation », Revue de psychothérapie psychanalytique de groupe, 2013, 1, n° 60, p. 97-108, https://www.cairn.info/revue-de-psychotherapie-psychanalytique-de-groupe-2013-1-page-97.htm

[6] Henri Léridon, Jacqueline Mandelbaum et al., « De l’infertilité à l’assistance médicale à la procréation », adsp, n° 75, juin 2011.

[7] Anne-Valérie Mazoyer, Sylvie Bourdet-Loubère, « Évolution du désir d’enfant après l’échec des aides médicales à la procréation », Revue de psychothérapie psychanalytique de groupe, 2013, 1, n° 60, p. 97-108, https://www.cairn.info/revue-de-psychotherapie-psychanalytique-de-groupe-2013-1-page-97.htm

[8] Anne-Valérie Mazoyer, Sylvie Bourdet-Loubère, « Évolution du désir d’enfant après l’échec des aides médicales à la procréation », Revue de psychothérapie psychanalytique de groupe, 2013, 1, n° 60, p. 97-108, https://www.cairn.info/revue-de-psychotherapie-psychanalytique-de-groupe-2013-1-page-97.htm

[9] Charlotte Frossard, « Quand l’enfant ne vient pas », Le Temps, 27 mars 2018, https://www.letemps.ch/societe/lenfant-ne-vient

[10] Henri Léridon, Jacqueline Mandelbaum et al., « De l’infertilité à l’assistance médicale à la procréation », adsp, n° 75, juin 2011.

[11] Fabienne Guerard, « Témoignage – Devenir parents coûte que coûte… », FIV & Co, 9 octobre 2018, https://fivandco.fr/temoignages/temoignage-parcours-pma-fiv-adoption/

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